Partie prenante de la création du Conseil National autoproclamé de la Vieillesse (CNaV), en décembre 2020, VIF va suivre les différentes étapes de ce mouvement qui repose sur un objectif simple : « Rien pour les vieux sans les vieux ».
Tout au long des semaines à venir, nous publierons les textes repères de cette initiative.
Manifeste
Pour une mobilisation citoyenne en faveur de la constitution d’un Comité National autoproclamé de la Vieillesse ( décembre 2020)
La plupart d’entre nous, sont déjà vieux, voire très vieux. D’autres sont beaucoup plus jeunes et même encore très jeunes. A tous, nous souhaitons qu’ils puissent vivre vieux eux aussi un jour. À condition que la vieillesse soit autant que possible une opportunité pour chacun, à égalité, de vivre de la façon la plus heureuse possible.
Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Les vieux que nous sommes, ainsi que ceux qui nous précèdent, sont trop souvent laissés sur le bord de la route, sortis du monde qui avance, parfois même enfermés, en tout cas considérés avec condescendance, comme des citoyens de seconde zone, peu respectés dans leurs droits et leur identité propre.
La société change, les vieux aussi, ainsi que leurs attentes.
Cela n’est plus possible que rien ne soit fait pour en tenir compte.
Nous voulons continuer d’être membres actifs de la société, y avoir une place, un rôle, une voix. Autant que tout autre citoyen.
Nous voulons que l’on tienne compte de notre aspiration à vieillir dans la continuité de nous-mêmes, de notre identité, de notre histoire.
Nous ne voulons pas d’une société qui ne nous regarde qu’au travers du médical, de l’assistance, de la dépendance, de la compassion. Nous ne voulons pas que l’on ne se soucie de nous que pour nous protéger.
Nous voulons continuer d’être considérés comme des personnes et des citoyens, capables de responsabilités pour soi et pour les autres, quel que soit notre âge et jusqu’à la fin de la vie.
Les vieux ont eux aussi des choses à apporter à la société. Faisons-le savoir. Il est temps que les choix qui nous concernent en termes aussi bien d’habitat, de mobilité, de culture, que d’accès aux droits et aux soins soient construits par et avec nous.
Rien pour les vieux sans les vieux.
Pour cela, créons ensemble un Conseil National autoproclamé de la Vieillesse (CNaV). Il aura pour tâche de proposer ce que pourrait être une politique de la vieillesse digne de ce nom. Puis nous demanderons aux candidats à l’élection présidentielle qu’ils s’engagent sur la création d’un Conseil National Consultatif des Personnes Vieilles (CNCPV) pour pérenniser notre initiative et veiller au bon suivi de ce que nous allons imaginer ensemble comme politique de la vieillesse.
cnav.demain@gmail.com
TwiCer: @cnav_demain
Revue de presse janvier 2022
Vieux et malades à nouveau interdits de visite : arrêtons cela !
Constitué en « Conseil national autoproclamé de la vieillesse », un collectif de signataires parmi lesquels Laure Adler, Annie Ernaux, Bernard Kouchner, Ariane Mnouchkine et Monique Pelletier s’insurge contre le retour des interdictions de visites dans les Ehpad.
Depuis quelques jours, les appels en provenance des familles de personnes hospitalisées ainsi que des associations de défense des résidents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) se multiplient. Face à la cinquième vague de Covid-19, tous dénoncent l’impossibilité, à nouveau, d’accompagner un (vieux) parent devant subir des examens ou se faire opérer, ou d’aller le visiter en institution. Alors que l’on nous dit que, grâce à la haute couverture vaccinale, les Ehpad traversent sereinement cette cinquième vague épidémique et qu’elle les épargne, pourquoi à nouveau ces interdits ? Chacun sait les lourdes conséquences qu’ont eues ces mêmes décisions de fermeture lors du confinement de 2020. En outre, plusieurs instances officielles se sont relayées ces derniers mois pour alerter sur le recours abusif à ce type de pratiques. Il en va ainsi de la proposition de loi adoptée à l’unanimité par le Sénat le 12 octobre : elle vise à créer un droit de visite dans les établissements de santé et les établissements médico-sociaux, afin de rétablir un droit minimum d’humanité pour ceux qui subissent l’épreuve de l’institutionnalisation ou de la maladie.
Droits fondamentaux
Le rapport de la Défenseure des droits, en date du mois de mai, rappelle qu’interdire les visites aux résidents d’Ehpad constitue une atteinte inacceptable à leurs droits fondamentaux, susceptible de les conduire à perdre leurs repères existentiels, voire l’envie de vivre. La décision du Conseil d’Etat du 3 mars a suspendu en référé l’interdiction de sortie pour les résidents d’Ehpad qu’avait recommandée à l’époque le ministère des solidarités et de la santé. Le Conseil a estimé que cette interdiction était devenue disproportionnée, la majorité des résidents étant vaccinés et la vaccination reconnue efficace. Si c’était vrai en mars avec deux doses de vaccin, cela ne l’est-il pas encore plus avec trois doses ? Si, malgré ces arguments accumulés, ces restrictions #eurissent à nouveau, c’est que certains craignent d’être tenus pour responsables en cas d’accident, et d’avoir à en assumer le risque judiciaire avec son corollaire financier. Notamment, le directeur d’établissement. La loi lui confère en effet la possibilité de prendre toutes « mesures particulières pour assurer l’intégrité physique et la sécurité des personnes et les soutenir dans l’exercice de leur liberté d’aller et venir ». Tout devient alors question de personnalité, mais aussi de contexte d’exercice professionnel. Difficile pour lui de s’y retrouver au milieu des injonctions contradictoires auxquelles il est soumis, entre les souhaits pas toujours convergents de l’ensemble de ceux qui gravitent dans l’établissement, les recommandations pas toujours très claires, voire franchement restrictives venues de l’agence régionale de santé (ARS) dont il dépend, auxquelles s’ajoutent trop souvent des sommations issues de la direction juridique du groupe (privé ou public) dont il dépend.
Dénis d’humanité
Récemment constitués en Conseil national autoproclamé de la vieillesse (CNAV), pour porter la parole des vieux et faire que leurs droits soient mieux respectés en société, nous appelons solennellement à ce que ces dénis d’humanité en établissements médico-sociaux cessent. Nous voulons que les mesures permettant d’assurer à la fois l’intégrité et la sécurité des personnes soient prises en codécision avec les premiers intéressés. En Ehpad, une instance existe pour cela : le conseil de la vie sociale (CVS), dont tout Ehpad a l’obligation de se doter. Mais ces CVS ont du mal à devenir l’outil démocratique qu’ils devraient être. Aidons-les à cela. Faisons en sorte que les résidents y soient vraiment représentés. Combien sont-ils à être intégrés dans les CVS aujourd’hui ? A combien pose-t-on la question de leur consentement à une nouvelle restriction du droit de visite ? Devraient aussi participer à ces décisions les représentants des familles de résidents, ainsi que ceux des personnels de l’établissement. A!n que le directeur puisse dans chaque lieu s’appuyer pour ses décisions sur l’avis de l’ensemble des personnes directement concernées, plutôt que d’agir seulement sous la pression d’oukases extérieurs. Car qui protège-t-on avec ces interdits ? S’est-on interrogé pour savoir ce que préfèrent les résidents entre le risque médical d’être contaminé, si tant est qu’il existe encore, et le risque de revivre l’enfermement qu’ils ont subi en 2020 ? Il est grand temps de les considérer comme des citoyens, de leur demander leur avis, de défendre leurs droits. Nous y prenons notre part.
Premiers signataires : Laure Adler, journaliste ; Francis Carrier, ingénieur ; Annie Ernaux, écrivaine ; Véronique Fournier, médecin ; Marie-Françoise Fuchs, fondatrice de l’association Old’Up ; Dominique Gillot, ancienne ministre ; Marie de Hennezel, écrivaine ; Bernard Kouchner, ancien ministre ; Ariane Mnouchkine, metteuse en scène ; Monique Pelletier, ancienne ministre La liste complète des signataires sur Lemonde.fr
Lancement du Conseil autoproclamé de la vieillesse (Cnav)
Vieux ou non, de nombreux militants du grand âge lancent en cette fin d’année le Conseil autoproclamé de la vieillesse (Cnav).
Objectif : devenir l’interlocuteur des pouvoirs publics sur toutes les questions liées au vieillissement. Explications de Francis Carrier, l’un des citoyens engagés à l’origine du projet.
Les quatre membres fondateurs du Cnav sont partis d’un constat simple : à la différence des personnes handicapées, dont la voix est portée auprès du gouvernement par le Conseil national consultatif des personnes handicap (CNCPH), aucune instance n’est consultée au sujet des politiques publiques qui concernent les vieux.
« Nous voulons faire monter la parole des plus âgés, qu’on arrête de parler en leur nom », résume Francis Carrier, président et fondateur de l’association Grey Pride.
Aux côtés de Véronique Fournier, fondatrice du Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin à Paris, Nicolas Foureur, son successeur à la tête du centre et du journaliste Éric Favereau, ils décident alors de créer le Cnav, le Conseil autoproclamé de la vieillesse.
Après avoir mobilisé tout l’été, une première réunion fondatrice s’est tenue en octobre. Le Cnav rassemble aujourd’hui une trentaine de membres du collectif fondateur et de parrains, parmi lesquels les anciens ministres Michèle Barzach, Michèle Delaunay, Bernard Kouchner ou Monique Pelletier ; la metteure en scène Ariane Mnouchkine ; les gériatres Françoise Forette et Olivier Saint-Jean ; la fondatrice d’Old Up (Marie-Françoise Fuchs ; l’association Cercle des proches aidants en Ehpad ; le conseiller départemental Jérôme Guedj ; l’aide-soignante Florence Braud…
« Changer de logiciel »
« Notre premier objectif est que le gouvernement se saisisse de cette instance, qu’elle devienne un conseil interministériel au même titre que celui des personnes handicapées, qui soit interrogé par le gouvernement dès qu’une loi va impacter les vieux », indique Francis Carrier.
Une prochaine réunion, ouverte à toutes les personnes intéressées, sera organisée dans les jours qui viennent.
Seront ensuite créées des commissions sur les différents sujets identifiés par le Cnav : habitat, urbanisme, mobilité, culture, finances, accès aux droits, accès aux soins. Le Cnav compte aussi interpeller les candidats à l’élection présidentielle, et leur demander de s’engager pour la création de ce Conseil national consultatif des personnes vieilles (CNCPV).
« Mais nous ne nous faisons pas d’illusion sur les promesses des candidats, ce n’est pas là que seront prises les grandes décisions », déplore Francis Carrier, qui regrette que les politiques grand âge ne se contentent jusqu’à présent que de rustines. « C’est l’ensemble du système qu’il faut regarder, l’ensemble qu’il fait remettre en cause. Il faut changer de logiciel ! », invite-t-il. Les personnes intéressées par cette initiative citoyenne peuvent contacter le Cnav par mail : cnav.demain@ gmail.com (ou suivre le Cnav sur Twitter : @CNaV_Demain)
Quel est cet impertinent « Conseil national autoproclamé de la vieillesse » ?
Des personnalités de tous horizons, médecins, sociologues, artistes, entre autres, ont créé un « Conseil national autoproclamé de la vieillesse ». Pour faire entendre la voix des citoyens sur cette thématique qu’ils jugent délaissée par les politiques et trop souvent réduite à une problématique médicale.
Un collectif hétéroclite de personnalités du monde de la culture, associatif, médical, entre autres, vient de créer un « Conseil national autoproclamé de la vieillesse ». Pour interpeller la société sur ce sujet qu’ils jugent trop souvent réduit à une problématique médicale, afin que les politiques s’en emparent.
Pourquoi un « Conseil national autoproclamé de la vieillesse » ?
Pour impulser le sujet de la vieillesse dans le débat public, et particulièrement à l’occasion de l’élection présidentielle. Le « Conseil national autoproclamé de la vieillesse » est né au mois de décembre, après que des médecins, mais aussi des citoyens ont fait le constat que les politiques se détournaient sans cesse du sujet de la vieillesse. Le projet de loi Grand âge de la ministre déléguée chargée de l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, venait d’être enterré. « On s’est dit qu’il ne fallait plus attendre les politiques, explique Nicolas Foureur, un des fondateurs de ce collectif et président de l’association « Vieux et chez soi ». Le changement viendra des citoyens et des vieux, même si notre but n’est pas d’écarter les politiques car on aura besoin d’eux à un moment pour faire évoluer les choses. »
« On veut faire entendre la parole des vieux, qui sont, comme toutes les minorités, invisibilisés », abonde Francis Carrier, fondateur de l’association “Greypride”. « Aujourd’hui, cette parole n’existe pas car personne ne veut s’identifier comme vieux. Des « sachants » pensent et parlent à leur place. Avec la crise sanitaire, des politiques ont décidé de “protéger” les vieux. Les protéger ? Plutôt les enfermer ! Cela nous a interpellés. Cela témoignait du fait qu’on considérait les vieux seulement comme des objets de soin, non comme des individus. » Le Conseil national autoproclamé de la vieillesse (CNaV) assume, par le nom qu’il s’est donné, une certaine impertinence. « C’est un clin d’œil amusé à La Cnav, Caisse nationale d’assurance vieillesse. Aussi une manière de dire qu’on ne se prend pas au sérieux », dit Nicolas Foureur.
Qui compose ce collectif ?
On y trouve une quarantaine de personnalités et citoyens de tous horizons, vieux et jeunes, médecins, sociologues, anciens ministres, universitaires, artistes, écrivains, journalistes, militants associatifs comme ceux des associations Old’up (“les vieux debout”). Parmi eux, la médecin de santé publique, cardiologue, ancienne présidente du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie Véronique Fournier (une des co-fondatrices), la journaliste Laure Adler, l’écrivaine Annie Ernaux, la directrice du Théâtre du Soleil à la Cartoucherie de Vincennes, Ariane Mnouchkine, l’ancienne ministre déléguée chargée des personnes âgées sous la présidence de François Hollande, Michèle Delaunay, ou l’ancien ministre de la Santé Bernard Kouchner… « On s’est dit qu’en s’y mettant à plusieurs, dans des disciplines différentes, avec des regards différents, les échanges seraient plus enrichissants », explique Nicolas Foureur, qui est par ailleurs médecin dermatologue et directeur du Centre d’éthique clinique de l’APHP. « Au sein de ce centre, qui réunit des philosophes, sociologues, soignants, représentants d’usagers etc., notre questionnement éthique autour des vieux nous a fait prendre conscience qu’aborder ce sujet d’un point de vue strictement médical était trop limité. C’est un sujet social ». « On a réduit la vieillesse à la dépendance », abonde Francis Carrier.
Que réclame ce Conseil autoproclamé ?
À défaut d’une loi Grand âge, on réclame la création d’un « Conseil national des personnes vieilles », à l’image « du Conseil national consultatif des personnes handicapées », poursuit Nicolas Foureur. Le but est d’aider le gouvernement à adapter les mesures de ses différentes politiques publiques aux personnes âgées. « Et que ce conseil soit interrogé sur les décisions qui vont impacter leur vie », indique Francis Carrier.
Des groupes de travail ont été créés « autour de la culture, l’habitat, les loisirs, la mobilité, les finances, entre autres, pour bâtir des propositions à partir du mois de janvier ». « Les vieux n’ont pas l’habitude d’être dans la revendication, par rapport à la société, constate Nicolas Foureur. L’avantage du CNaV est d’être composé de vieux, de très vieux, mais aussi de la génération précédente, de « boomers », qui portent le flambeau pour plus tard et font valoir une parole qu’on n’entend pas habituellement. »
« Le but fondamental, poursuit Francis Carrier, c’est de pouvoir vieillir en étant soi jusqu’à la fin de sa vie et ne pas être déshumanisé dans un corps considéré comme ne servant plus à rien, et qui n’est même plus regardé par le reste de la société. C’est un combat qui concerne tout le monde, car on est tous vieux un jour. »
Lancement du Conseil autoproclamé de la vieillesse (Cnav)
Des militants du grand âge ont lancé le 8 décembre dernier, le Conseil autoproclamé de la vieillesse. L’idée étant de devenir l’interlocuteur des pouvoirs publics sur toutes les questions liées au vieillissement et de peser dans la prochaine campagne présidentielle.
Les quatre membres fondateurs du Cnav (clin d’œil facétieux à l’autre Cnav, Caisse nationale de l’assurance vieillesse en charge des retraites) sont partis d’un constat simple : à la différence des personnes handicapées, dont la voix est portée auprès du gouvernement par le CNCPH, aucune instance n’est consultée au sujet des politiques publiques qui concernent les vieux.
Et pourtant, les ainés de nos jours pèsent « lourd », représentant une large part de la population française -mais également mondiale.
« Être vieux en France aujourd’hui, c’est ne plus être entendu, écouté, pris au sérieux… » indique la page Facebook de ce nouveau collectif. Et d’ajouter : « l’habitat, l’urbanisme, les finances, la culture, l’accès aux droits et aux soins autant de thèmes dans lequel nous devons agir pour créer un environnement dans lequel nous souhaiterons vieillir ».
« Le président actuel avait promis la création d’un conseil de ce genre. À ce jour, la promesse n’a pas été tenue » précise le sociologue Michel Wieviorka, membre de ce Cnav au micro de RMC cette semaine.
Pour définir de quelle « vieillesse » on parle, il précise que cette nouvelle structure est constituée de membres « autour de 70 ans », même s’il assure que des gens de tous âges participent à ce nouveau collectif.
Ce conseil, précise encore Michel Wieviorka, « ne demande pas d’être plus considéré que les autres catégories d’âge, pas plus, mais pas moins. Ce n’est pas un mouvement ‘catégoriel’. Nous ne demandons pas du tout que notre génération soit privilégiée. Aujourd’hui, une partie de notre population n’existe pas, n’est pas considérée. Notre démarche n’est pas politique, pour l’instant. On espère susciter de l’intérêt ».
« Nous voulons faire monter la parole des plus âgés, qu’on arrête de parler en leur nom », résume Francis Carrier, président et fondateur de l’association Grey Pride.
Le Cnav rassemble à ce jour une trentaine de membres du collectif fondateur et de parrains, parmi lesquels les anciens ministres Michèle Barzach, Michèle Delaunay, Bernard Kouchner ou Monique Pelletier ; le metteur en scène Ariane Mnouchkine ; les gériatres Françoise Forette et Olivier Saint-Jean ; la fondatrice d’Old Up Marie Françoise Fuchs ; l’association Cercle des proches aidants en Ehpad ; le conseil départemental Jérôme Guedj ; l’aide-soignante Florence Braud…
ÉDITORIAL. Rien sans les vieux
La population des plus de 75 ans va doubler en France dans les 50 prochaines années. Une évolution majeure dont le pays tarde à prendre conscience. Et qui ne tient pas encore la place qu’elle devrait dans le programme des candidats à la présidentielle.
La France comptait 100 centenaires en 1900, 1 000 en 1970. « Ils approcheront les 200 000 en 2060 » prévient un récent rapport de la Cour des comptes (1). À côté des transitions énergétiques et numériques en cours, cette transition démographique se manifeste encore à bas bruit. Elle s’annonce pourtant lourde de conséquences pour la vie quotidienne de milliers d’entre nous et de nos proches. Les plus de 75 ans représentaient 7 % des Français en l’an 2000. Ils seront 12 % en 2030 ! Quels seront leurs besoins ? Où vivront-ils ? Comment les aider à prévenir la dépendance et la solitude ? Et, quand elles sont là, comment maintenir une vie digne ?
Au lendemain de graves crises – la canicule en 2003, l’impact du confinement dans les Ehpad-, ces questions font la Une quelque temps. Ni l’opinion ni les politiques ne semblent s’en emparer durablement. Non pas que rien ne se passe sur le terrain : l’offre de services, d’aides et d’acteurs dans ces domaines est si foisonnante qu’on peine plutôt à s’y retrouver. De fait, au carrefour de questions médicales, sociales et économiques, le sujet est complexe et il lui manque un acteur principal, ce « guichet unique » si souvent promis et toujours en construction.
Si la question du grand âge passe souvent au second plan, c’est aussi qu’elle est douloureuse. On le sait depuis Blaise Pascal, nous sommes très doués pour éviter, autant que faire se peut, les sujets ayant à voir de près ou de loin avec notre mort. Sauf que c’est de vies qu’il s’agit.
Depuis 1947, l’espérance de vie a augmenté de 20 ans. Mais vivre plus longtemps ne rend toujours pas « inoxydable ». Schématisons : au « jeune » retraité actif et engagé succèdent progressivement, entre 75 et 85 ans, le retraité vulnérable (par la maladie, le veuvage, le risque de chute…), puis au-delà de 85 ans, souvent, la personne dépendante.
« Mamy-boom »
Les effectifs concernés par ces séquences sont en train d’exploser avec l’arrivée à ces âges des classes pleines du baby-boom, cette période où la France, de 1945 à 1975, enregistrait plus de 800 000 naissances par an. Le « mamy-boom » est là : les femmes y sont majoritaires. Et elles n’entendent pas compter pour des prunes.
En témoigne ce manifeste lancé en décembre par de vaillants septuagénaires (dont plusieurs anciennes ministres) rassemblés au sein d’un Conseil national autoproclamé de la vieillesse (CNaV). Leur revendication n° 1 : « Rien pour les vieux sans les vieux ». « Nous voulons que les vieux que nous sommes ou serons un jour se sentent appartenir à une société bienveillante, attentive et respectueuse de ce qu’ils sont […]. »
Certes, ce n’est pas un tel manifeste qui suffira à pourvoir les milliers de postes toujours vacants d’aides-soignants et d’aides à domicile. Et les avancées, réelles, du dernier projet de loi des finances en la matière (revalorisations, recrutements) exigeront d’être tenues dans le temps long.
L’intérêt de la démarche du CNaV est ailleurs. Primo, il s’agit de se rappeler au bon souvenir des candidats à la présidentielle, peu diserts sur le sujet pour l’instant. Secundo, il s’agit d’interpeller la société tout entière. Les études l’affirment, c’est dès la cinquantaine que se préviennent les pertes d’autonomie du grand âge : par le recours à davantage d’activités physiques régulières, les premières adaptations de logement, l’entretien d’un réseau de sociabilité actif, etc. Collectivement, nous serions tous bien inspirés de ne pas attendre d’avoir 60 ans pour nous y préparer.
Les vieux veulent peser sur la campagne présidentielle !
Quarante personnalités politiques, intellectuelles, issues du monde de la culture ou associatif ont fondé le Conseil national autoproclamé de la vieillesse pour faire de l’avancée en âge l’un des thèmes de la campagne présidentielle. Martine Gruère, vice-présidente du mouvement Old’Up, explique les objectifs du collectif.
Notre Temps : Qu’est-ce qui vous a conduit à participer à la création du Conseil national autoproclamé de la vieillesse (CNaV) ?
Martine Gruère: L’un des éléments déclencheurs de la constitution du collectif réside dans le fait que la loi grand âge autonomie a été, une fois de plus, repoussée à une échéance inconnue. Notre conviction, à Old’Up, c’est qu’il faut donner du sens et de l’utilité à l’allongement de la vie. Nous sommes tous adultes, quel que soit notre état, et nous revendiquons notre place de citoyens engagés dans la vie de la société. Nous voulons être reconnus comme tels et non pas mis à l’écart parce que vieux. Il en découle pour la société une perte de capacité d’initiatives que nous représentons. Nous sommes près de 30% de la population et nous sommes mis à l’écart a priori, en raison de notre âge. Au lieu d’être pris en compte, d’être associés aux projets, d’être entendus dans nos projets. La société doit changer le regard qu’elle porte sur les vieux.
À quel âge est-on « vieux » ?
M. G.: À partir du moment où l’on accepte l’idée qu’on l’est ! Il n’y a pas d’âge ! Mais il y a un amalgame entre vieillesse et dépendance alors qu’en proportion, il n’y a pas tant de personnes dépendantes que cela. Cette confusion est désolante. Résultat : à partir d’un certain âge, nous sommes considérés comme inintéressants. On ne nous écoute plus. La crise sanitaire et le confinement ont empiré les choses. Les discours du type : « limitez vos sorties », « faites attention à vous ! » sont insupportables. J’ai 76 ans, je suis responsable de moi. Je suis capable de discerner ce que je suis capable de faire ou de ne pas faire. Et on ne doit pas me le dire à ma place. En famille, c’est extraordinaire : c’est la primeur aux adultes travaillant qui ont plein de choses à raconter. Nous sommes supposés n’avoir rien à dire… Il faut que les vieux s’autorisent à penser que leurs avis comptent et qu’ils peuvent participer à la vie de la société, prendre des responsabilités, etc. Cette mise à l’écart est une perte incroyable pour la société.
Qu’attendez-vous de la campagne présidentielle ?
M.G.: Au sein du CNaV, nous voulons que les enjeux de l’avancée en âge soient pris en compte par les candidats. Nous allons contacter tous les postulants à la présidence et les députés pour faire savoir nos positions et demander la constitution d’un Conseil national consultatif des personnes vieilles, CNCPV, à l’image du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). (Ndlr : le CNCPH conseille les pouvoirs publics dans l’élaboration, la conduite et l’évaluation des politiques et de l’action publiques concernant les personnes en situation de handicap). Cette instance serait, comme c’est le cas du CNCPH, reçue par le Premier ministre et l’ensemble des ministères pour réfléchir aux moyens d’améliorer les situations auxquelles les vieux sont confrontés. Ce qui fonctionne très bien – et tant mieux – pour les personnes handicapées. C’est un moyen de reconnaître l’utilité sociétale des personnes âgées.
La lettre ouverte du CNaV publiée le 22 décembre dans Le Monde dénonce les mesures de restrictions prises par certains Ehpad à l’occasion des fêtes de fin d’année. Estimez-vous que le fait que les résidents soient tous vaccinés rende inutiles de telles mesures et qu’il faille rouvrir plus largement les établissements ?
M. G.: Tant qu’il n’y aura pas de représentants d’usagers ni de personnes de l’extérieur, elles-mêmes âgées, présentes dans les conseils de vie sociale des établissements pour que les choses avancent sans craindre de prendre position par rapport à la direction, ce ne seront pas des lieux de véritable démocratie. Quel est le constat ? Le sanitaire prime sur tout le reste dans beaucoup d’Ehpad ! L’humain est oublié et en particulier ce besoin de rencontrer des gens, de partager, d’être en lien avec d’autres. C’est dramatique ! Cela revient à traiter les gens comme des objets. Or, nous sommes des sujets, quel que soit notre état. On le sait, il y a eu des morts dans des établissements parce que les résidents ne pouvaient plus voir leurs proches, qu’il n’y avait plus de visites régulières. Des gens ont préféré se laisser mourir que de vivre cette solitude monstrueuse. Le vieux est une personne !
Des personnalités s’organisent pour imposer un débat sur « la vieillesse » à la présidentielle
Le Conseil national autoproclamé de la vieillesse, créé en décembre, souhaite la création d’une instance qui conseillerait le gouvernement pour que les politiques publiques soient adaptées aux personnes âgées. Par Béatrice Jérôme
Ils rêvent de mettre la « vieillesse à la mode », imaginent des « Vélib’ à trois roues » à Paris pour pédaler sans risquer de tomber, des « casques audio au théâtre ou au cinéma » pour combler un début de surdité, des « taxis gratuits » pour se déplacer en ville, des maisons de vacances adaptées à leurs déplacements difficiles.
Ils fourmillent d’idées pour que « la société tienne compte de leur aspiration » à exercer « leur citoyenneté », disent-ils, et cesse de les considérer uniquement sous l’angle de leurs défaillances physiques ou cognitives. Raisons pour lesquelles ils ont fondé ou rejoint le Conseil national autoproclamé de la vieillesse (CNaV). Le collectif s’est créé en décembre et revendique son « impertinence ». « Ce qui m’intéresse, c’est que notre action reste intempestive, sauvage, éruptive », explique la docteure Véronique Fournier, à l’origine du collectif avec trois autres personnes.
Le CNaV réunit une bonne quarantaine de membres ; anciens ministres, médecins, universitaires, dramaturges, metteurs en scène, écrivaines, journalistes, militants associatifs. L’ambition du mouvement est d’imposer la vieillesse parmi les thèmes majeurs de la campagne présidentielle. Sa principale revendication : la création d’un « Conseil national des personnes vieilles » (CNPV), une instance officielle chargée de souffler au gouvernement des mesures adaptées aux personnes âgées dans toutes les politiques publiques. A l’instar du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) placé auprès du premier ministre.
À l’automne, constatant que la loi pour le grand âge, promise par Emmanuel Macron, resterait lettre morte, ils ont voulu « prendre [leur] destin en main. C’est ainsi qu’est né le CNaV », raconte la docteure Fournier.
Un « gang d’anciens ministres »
Cardiologue, fondatrice du centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin, Véronique Fournier, 67 ans, mène des recherches sur l’allongement de la vie à partir de la parole des personnes âgées. Associé à ces travaux, le docteur Nicolas Foureur, 50 ans, a œuvré à ses côtés au lancement du CNaV : « C’est typiquement un projet de “boomers”, une génération qui râle pour elle-même mais qui sous un apparent individualisme veut faire avancer le collectif. »
Le fil rouge du CNaV tient en peu de mots : « Aucune décision pour les vieux ne doit être prise sans demander l’avis des vieux », résume Francis Carrier, 67 ans, autre instigateur de la démarche. A la tête de l’association Grey Pride, cet ancien administrateur d’Aides milite pour la reconnaissance de l’identité des homosexuels âgés et pour que la vieillesse cesse « d’être un repoussoir ». Avec une stratégie rôdée pour y parvenir : inciter des personnalités connues ou non à s’assumer comme « vieilles » ou « vieux ». Protagoniste du projet, Éric Favereau, 67 ans, journaliste à Libération, a fondé le site Internet Vif-fragiles.org (VIF comme « Vieux, inégaux et fous »). Lui aussi insiste sur la nécessité de « donner la parole aux premiers intéressés pour faire avancer la question de la vieillesse ». Au CNaV, on croise un « gang d’anciens ministres », galèje Michèle Delaunay, 74 ans, ancienne ministre déléguée chargée des personnes âgées sous la présidence de François Hollande. On y trouve aussi Monique Pelletier, 95 ans, ex-ministre déléguée à la condition féminine de Valéry Giscard d’Estaing, qui se mobilise depuis longtemps pour la cause des personnes âgées isolées. À leurs côtés, Michèle Barzach, 78 ans, et Bernard Kouchner, 82 ans, anciens ministres de la santé. « Dans les pays qu’on dit “primitifs”, l’expérience des vieux compte, remarque l’ancien ministre de la santé, cofondateur de Médecins du monde. En France, ce n’est pas le cas et c’est dommage. Il faut associer les vieux aux décisions qui les concernent. » A 72 ans, Dominique Gillot s’assume en « vieille dame ». L’ex-secrétaire d’Etat chargée de la santé dans le gouvernement de Lionel Jospin et ex-présidente du Conseil national consultatif des personnes handicapées « le clame haut et fort pour montrer que l’on peut avancer en âge tout en ayant une activité dans la société ».
La crise sanitaire, le déclic
Parmi les personnalités du CNaV, beaucoup évoquent le confinement des résidents d’Ehpad au début de la pandémie de Covid-19 qui les a « stupéfaits », « scandalisés ». « On a privilégié la survie au détriment du sens de la vie », dénonce Didier Sicard, ancien président du Centre consultatif national d’éthique. Pour l’ancien professeur de médecine, « cette violence insoutenable infligée » aux vieux justifie, plus que jamais, « une structure qui incarne les personnes âgées face aux pouvoirs publics qui fasse avancer le débat sur leur sort ».
C’est aussi le traitement de la crise sanitaire dans « certains Ehpad » qui a conduit le sociologue Michel Wieviorka à rallier le CNaV. « Je souscris à l’idée que les solutions doivent venir de la société civile ; que les très âgés doivent en être sujets et acteurs », approuve celui qui déclare s’engager « en tant que futur vieux ».
Ariane Mnouchkine juge l’initiative « revigorante ». À bientôt 83 ans, la directrice du Théâtre du Soleil à la Cartoucherie de Vincennes (Val-de-Marne) a « le privilège d’être encore en activité ». « Mais je ne veux pas que, à la moindre faiblesse, on me mette dans une cage molletonnée pour me “protéger”. Je me débats d’avance. » La metteuse en scène compte sur le CNaV pour « élaborer des propositions afin que les vieux ne soient plus séparés du reste de la société, puissent continuer à y être utiles, à demeurer partie prenante de l’humanité ». La journaliste Laure Adler « revendique » son âge, 71 ans, pour « s’exprimer » au sein du CNaV. Pour la productrice de radio, autrice d’un livre sur le sujet (La Voyageuse de nuit, Grasset, 2020), « il y a un délit de vieillesse hélas, communément partagé en France », qui conduit à « déresponsabiliser les vieux, à les priver de leurs droits élémentaires ». Le CNaV porte la signature, dit-elle, de « la génération de Mai 68 » qui veut que sa classe d’âge « reste actrice de sa propre histoire », comme il y a plus de cinquante ans lorsqu’elle disputait le pouvoir aux « vieux ».
Groupes de travail
Que le CNaV agrège des scientifiques, des politiques, des intellectuels, des CSP+, ne veut pas dire « qu’on cultive l’entre-soi », se défend Francis Carrier. « On veut au contraire défendre tous les vieux. » Ne pas devenir un club de « vieux mondains », admet Dominique Gillot, suppose d’élargir le cercle à des personnalités plus « grand public » et d’« attirer des jeunes », poursuit Véronique Fournier.
Une dizaine de groupes de travail phosphore d’ores et déjà au sein du CNaV sur des propositions sur la citoyenneté, la fracture numérique, l’habitat, la mobilité et sur l’organisation du futur « Conseil national des personnes vieilles ».
Lire aussi Au printemps, le ministère de l’autonomie avait préparé une version d’un projet de loi baptisé « générations solidaires ». Le texte proposait la création d’une conférence nationale de la transition démographique. L’idée ressemble à celle du CNaV. Elle dort dans un tiroir depuis lors.
« Il est temps que l’on parle des vieux » : l’appel du Conseil national autoproclamé de la vieillesse
Partant du constat d’échec du premier confinement au début de la pandémie de Covid-19, les « vieux » comptent faire entendre leur voix pour l’avenir.
« Être vieux en France aujourd’hui, c’est ne plus être entendu, écouté, pris au sérieux… ». Un Conseil national autoproclamé de la vieillesse a été créé en décembre, avec pour but la création d’une instance officielle qui conseillerait le gouvernement sur les questions de politiques publiques adaptées aux personnes âgées.
« L’habitat, l’urbanisme, les finances, la culture, l’accès aux droits et aux soins autant de thèmes dans lequel nous devons agir pour créer un environnement dans lequel nous souhaiterons vieillir », écrivent-ils sur leur page Facebook. Michel Wieviorka, sociologue, membre du Conseil national autoproclamé de la vieillesse, était l’invité de RMC ce mercredi matin. « Il est temps que l’on parle des vieux et que les vieux parlent eux-mêmes », clame-t-il.
« Le président actuel avait promis la création d’un conseil de ce genre. À ce jour, la promesse n’a pas été tenue. »
Pour définir de quelle « vieillesse » on parle, il précise que ce conseil national de la vieillesse est porté par des membres « autour de 70 ans », même s’il assure que des gens de tous âges participent à ce nouveau collectif.
« On est dans un pays où le pouvoir n’aime pas tellement les corps intermédiaires, les médiations entre lui et les associations. Le président actuel avait promis la création d’un conseil de ce genre. A ce jour, la promesse n’a pas été tenue. On demande à ce que ce soit fait et on agit, de bas en haut. »
Le constat « terrifié » du premier confinement dans les EHPAD
« Le point de départ d’un certain nombre d’entre nous vient du constat terrifié de ce qu’il s’est passé durant le premier confinement. Pendant plusieurs mois, on a laissé un certain nombre de vieux dans l’isolement, dans l’incompréhension… Je ne dis pas que la société est indifférente, au contraire. Elle se pose des questions. Le problème, c’est que les vieux ne sont pas dans les radars ».
« Aujourd’hui, une partie de notre population n’existe pas »
Ce conseil, comme l’explique Michel Wieviorka, ne demande pas d’être plus considéré que les autres catégories d’âge, pas plus, mais pas moins. « Ce n’est pas un mouvement ‘catégoriel’. Nous ne demandons pas du tout que notre génération soit privilégiée. Aujourd’hui, une partie de notre population n’existe pas, n’est pas considérée. Notre démarche n’est pas politique, pour l’instant. On espère susciter de l’intérêt. » Pour conclure, Michel Wieviorka rappelle que bien d’autres sociétés prennent « plus de considération » pour leurs aînés. « On n’y met pas les vieux à la trappe comme ça ».