Vendredi 1er juillet, lors d’une cérémonie de départ à la retraite, un ami, chef de service, pourtant bienveillant, évoque quelques-unes des racines du mal hospitalier. Selon une directive verticale (on suppose en provenance du ministère, ou de l’Agence régionale de santé, voire de la direction générale du CHU), afin de conserver son effectif infirmier, il convient que le taux d’occupation des lits soit au moins de 92% pour le service et de 140% pour l’hôpital de jour. Évidemment, lui et ses cadres infirmiers s’arrangent pour qu’il en soit ainsi ; quitte, en basses eaux, à prolonger les séjours au-delà de ce qui serait nécessaire. Résultat, cette norme, dont on aimerait connaître l’origine, ne génère aucune « optimisation » des ressources humaines ; elle a même une conséquence tout à fait délétère puisqu’elle contribue à remplir artificiellement les lits, ce qui ne laisse que très peu ou pas de disponibilités pour des besoins ponctuels, le post-urgence notamment. Peu importe, pour la direction et la tutelle la norme est respectée, preuve affichée de leur saine gestion.
Et si, juste pour voir, on faisait confiance à ceux qui gèrent les soins ? Si on oubliait la norme des 92 et 140%, qui, de toute évidence, ne sert à rien si ce n’est à dégrader la situation ? Le service conserverait son effectif de soignants et des places deviendraient miraculeusement disponibles pour, entre autres, assurer le post-urgence. En prime, on remet à disposition les centaines d’heures consacrées à contourner une règle absurde et à remplir des tableurs Excel.
Redonner du sens et de l’envie au métier de soignant n’est peut être pas le bout du monde. Il passe avant tout par le retour au bon sens, par des mesures qui ne font, hélas, pas partie des 41 propositions du ministre Braun.
Bernard Bégaud