Des chiffres en guise de défi

Les Ehpad ont beau être une aberration sociétale – pourquoi rassembler dans un lieu clos des gens du même âge ? –, le temps les rend de plus en plus cruels. Et ils sont confrontés à des situations de plus en plus difficiles. Comme le confirme une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) rendue publique mi-juillet1, les résidents y sont en effet de plus en plus âgés, et de plus en plus dépendants.

Ehpad Habrioux (Aigre)

Fin 2019, 730 000 personnes fréquentaient ainsi un établissement d’hébergement pour personnes âgées, un nombre très légèrement supérieur à celui de 2015, dont plus de 80% étaient en Ehpad.

Entre 2015 et 2019, la population en établissement a vieilli. Fin 2019, la moitié des résidents avaient plus de 88 ans, soit 7 mois de plus qu’en 2015. Les Ehpad accueillent, de fait, les résidents les plus âgés : la moitié des personnes accueillies dans ces établissements ont 88 ans et 7 mois ou plus, et seuls 18% ont moins de 80 ans. À l’opposé, les moins de 80 ans représentent un tiers des résidents accueillis en résidence autonomie ou en unité de soins de longue durée (USLD).

Parallèlement, le niveau moyen de dépendance des résidents s’accroît entre 2011 et 2019. En 2011, toutes catégories d’établissement et modalités d’accueil confondues, 81% étaient en perte d’autonomie, ils étaient 83% en 2015 et 85% en 2019. Plus de la moitié des résidents des Ehpad (54%, comme en 2015) sont très dépendants. Fin 2019, 43% des personnes âgées de moins de 70 ans vivant en Ehpad étaient très dépendantes. C’est le cas de 56% des personnes de 90 ans ou plus. Fin 2019, parmi les résidents dépendants de moins de 70 ans, 93% avaient des troubles de cohérence, contre 86% de ceux de 80 ans ou plus.

En 2019, environ 261 000 résidents souffraient, par ailleurs, de la maladie d’Alzheimer ou apparentée, soit 40% des personnes accueillies. 14% de ces résidents étaient accueillis dans une unité spécifique pour personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et maladies apparentées.

Enfin, deux « sorties » sur trois sont dues à un décès. Et dans 75% des cas, ce dernier survient dans l’établissement. Les autres « sorties » correspondent à des transferts vers un autre établissement, ou à un retour vers le domicile personnel ou celui d’un proche.
En 2019, les personnes décédées en établissement avaient en moyenne 89 ans et 1 mois, contre 88 ans et 7 mois en 2015.

Des Ehpad se révélant être de plus en plus la dernière étape d’une politique de la grande vieillesse à bout de souffle.

Éric Favereau

1) Cette enquête est conduite tous les quatre ans par la Drees auprès de l’ensemble des établissements d’hébergement pour personnes âgées, y compris les unités de soins de longue durée et les centres d’accueil de jour (10 900 structures enquêtées en 2019).